Une résurrection militante, une oeuvre toujours troublante.

Ceux qui l’ont connue avec Antony and The Johnsons le savent, nous ne sommes pas dans une veine musicale qui respire le bonheur. En 2005, avec « I am a bird now », le monde découvrait un artiste hors norme au physique troublant et au chant doloriste, aussi puissant que bouleversant. 


Aujourd’hui « Hopelessness » réenchante brillamment la protest song. Il suffit d’observer les titres des onze morceaux de l’album pour comprendre que personne ne sera épargné. Il s’agit d’un album au propos engagé, presque enragé, dans lequel Anohni s’insurge contre un monde consumériste et violent, détourné d’une nature qu’il néglige et bafoue sans aucun remord jamais. De la planète à la justice toujours bafouées, tout y passe : réchauffement climatique, inégalités sociales, drones meurtriers ou même Obama auquel elle adresse son immense déception. La chanteuse tire à vue en exprimant avant tout un désespérant sentiment d’impuissance et de culpabilité d’une voix possédée et vibrante, avec un petit quelque chose qui nous fait penser à Benjamin Clementine.


Malgré son titre désespéré, « Hopelessness » est l’un des disques les plus euphorisants de la saison. Le piano minimal et les cordes d’Antony and The Johnsons ont été remplacés par les arrangements électroniques de deux maîtres du genre, Hudson Mohawke et Oneohtrix Point Never, dont le groove inventif permet à Anohni d’aborder des sujets graves sur une électro-pop ultra organique sans que le résultat ne se noie pour autant dans un pathos pesant.

« Je veux stimuler la conscience des autres et offrir la plus exaltante des bandes son à cette réflexion. Cela doit rester pop, entraînant, fédérateur et excitant. », déclare Anohni lors de la sortie de l’album aux Etats-Unis. 


L’éternelle question du fond et de la forme … une vraie réussite ici que l’on doit autant à l’intervention des producteurs à la pointe de la scène électronique alternative et expérimentale qu’à l’engagement artistique et militant de la chanteuse qui apporte un souffle véritablement nouveau à son œuvre. 

Après le « Demolition Six Project » de PJ Harvey et « A Moon Shaped Pool » de Radiohead, « Hopelessness » serait une preuve supplémentaire qu’une œuvre militante et engagée peut aussi rimer avec beauté et finesse. 

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