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La loi du marché, de Stéphane Brizé

 

Notre société est malade. Le monde du travail est perverti. Les rapports humains sont déshumanisés. Bref, plus rien ne fonctionne. Derrière cette philosophie de comptoir se cache La loi du marché. Film hybride, expérience cinématographique chirurgicale, cette œuvre ne ressemble à aucune autre. Cinéaste français le plus fascinant de sa génération, Brizé emmène Lindon dans une aventure extra-ordinaire. Jamais deux sans trois.

 

Thierry a 51 ans et est au chômage. Il va à Pole emploi gueuler sur l’incompétence des salariés. Il se rend à la banque demander un crédit pour sa voiture d’occasion. Il prend des cours de danse avec sa femme pour passer de bons moments. Thierry est comme tout le monde, finalement. On pourrait multiplier ces scénettes, encore et encore, jusqu’à l’épuisement. Alors pourquoi dépeindre aussi scrupuleusement le quotidien d’un homme anonyme ? Parce que cet individu, c’est le voisin d’à côté, le pote de bistrot, le père de famille. Thierry, c’est nous tous.

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Stéphane Brizé fait du Stéphane Brizé en se réinventant. Le silence et les plans-séquences font sa marque de fabrique depuis ses débuts. Avec La loi du marché, il pousse cette technique à son paroxysme pour livrer une œuvre viscérale. C’est un auteur qui scrute l’intérieur de l’âme comme personne ne l’avait fait auparavant. L’extrême solitude d’un être (Je ne suis pas là pour être aimé), la passion tempérante de deux amants (Mademoiselle Chambon) ou le lien retenu entre la vie et la mort (Quelques heures de printemps) précèdent une nouvelle étape artistique : la réinvention de la forme scénaristique.

 

Aujourd’hui, il met à mal le système français en le plaçant face à ses injustices et ses propres paradoxes. Il fait tout cela en pointant son objectif sur un acteur, le seul de ce long-métrage. Vincent Lindon. Lui qui, à sa façon, réinvente la manière de jouer. Entre rôle de composition et interprétation ultra-réaliste, il n’incarne pas son personnage, il est Thierry. Plus que de coutume, le réalisateur resserre son cadre pour ne retenir de la séquence que sa substantifique moelle. Et, par son esthétisme brut, l’essence de son art se retrouve dans le visage de son alter-ego. Grave, sensible, taciturne, mélancolique. Les qualités qui font de Lindon le plus grand acteur français se décuplent dans La loi du marché. Et les raisons pour lesquelles il faut aller voir ce film sont tout aussi nombreuses.

 

Hugo Harnois.

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