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L’écume des jours de Michel Gondry

En Septembre, la chronique cinéma de radio ellebore reprenait du service avec The We and the I. À peine huit mois plus tard, Michel Gondry sort un nouveau long métrage adapté du roman de Boris Vian : L’écume des jours. De retour en France après un séjour fructueux et poétique aux Etats Unis, Gondry ne se refuse rien. Un casting de luxe pour un roman prétendu intouchable au risque de gâcher la poésie, les images et la cinématographie inhérentes à l’œuvre de Vian. L’histoire est on ne peut plus simple : Colin tombe amoureux de Cholé et l’épouse, mais celle-ci a un nénuphar dans le poumon qui la déssèche. Un extraterrestre poétique et farfelu que seul Gondry pouvait explorer.

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La question de l’adaptation est toujours délicate. Il y aura toujours des grincheux et des grognons pour soupirer le sempiternel « le livre était mieux » ou bien « ça ne respecte pas ». En l’occurrence, le film de Michel Gondry est une adaptation réussie, et extrêmement fidèle au roman. Bien sur, le scénario est remanié, la ligne narrative déformée, des éléments sont évacués. Mais la fantaisie, les analogies, les mots valises chers à Boris Vian sont respectés à la lettre, à l’image près par l’astucieux réalisateur de Rembobinez s’il vous plaît. L’ingénieux s’amuse et virevolte entre effets spéciaux, musique jazz et pop, décors incroyables et mixe le tout d’un soupçon d’animation.

  

Pour la première fois au générique de fin, le chef décorateur apparaît avant le directeur de la photographie. Stéphane Rozenbaum mérite toute notre reconnaissance pour la création incroyable de cet univers enchanté, poétique, en parfait accord avec l’évolution de l’histoire et de ses personnages.

 

En effet, si la poésie du monde est d’abord synonyme de joie, d’émulation, d’enthousiasme et d’inventivité ; elle se mue peu à peu en une tristesse sans fond, une mélancolie qui fait basculer le film dans une veine beaucoup plus sombre et réaliste. C’est peut-être là le géni de Gondry et Vian : réinventer un univers, pour mieux parler de notre société, de ses travers et de ses injustices. En cela, l’écume des jours est presque un film politique : la philosophie de Jean Sol Partre n’a plus de sens, les gens se droguent de paroles vides, consomment sans compter jusqu’à ce que la dure réalité de la vie, de la maladie les rattrape.

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Ainsi, sous ses airs bon enfant, jubilatoire et pop, L’écume des jours est un film noir. On n’y retrouve pas la tendresse extrême et la même mélancolie douce de son magistral Eternal sunshine of the spotless mind mais Gondry était le seul à avoir l’imaginaire et la poésie nécessaires pour se saisir de la douce amertume de Boris Vian face à cette chienne de vie.  

 

Clara Lavigne

 

 

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