Yôkainoshima : l’île aux monstres de Charles Fréger.

L’exposition Yôkainoshima prolonge directement Wilder Mann, une série de photos prises dans les campagnes d’Europe que le photographe était venu présenter à l’Espace Malraux en 2014. Un écho transversal, aussi, de son travail sur les sumos, les bleus de travail et les coiffes bretonnes. Un fil rouge : le costume.

L’amoureux du portrait Charles Fréger est parti au Japon sur les traces de créatures surnaturelles qui peuplent l’imaginaire nippon et surgissent lors des fêtes traditionnelles. En cinq voyages, trois mois de prises de vues et deux saisons, le photographe a parcouru l’archipel dans son ensemble pour poursuivre son fascinant inventaire des communautés humaines.

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© Charles Fréger, Wilder Mann

« Je m’intéresse fort à l’idée du devenir animal. J’aime me dire qu’en Europe par exemple, les gens qui se déguisent en ours se transforment vraiment en ours, ils font des attitudes d’ours. C’est brutal, païen, incarné. En Europe, l’homme cache son humanité pour devenir animal. Au Japon, c’est beaucoup plus théâtral. », explique Charles Fréger lors de la visite de l’exposition.

« L’homme se laisse voir, un peu comme nos masques de la Commedia del’arte. L’homme n’incarne pas, il joue. Tout est dans la distanciation. Parfois, pendant les mascarades, les gens quittent leur masque et le remettent ensuite. Et c’est ça qui me passionne : les différences culturelles. »

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© Charles Fréger, Yôkainoshima

L’ensemble du projet Yôkainoshima est plus vaste que Wilder Mann en un sens, car s’il se concentre sur un seul pays, les silhouettes sont plus nombreuses, sans pour autant en être une liste exhaustive. Plutôt des clins d’oeil.

Malgré une forte urbanisation, la survivance des yôkai témoigne du maintien dans le Japon contemporain d’une foule de croyances en ces créatures surnaturelles : gobelins, démons, ogres, monstres, spectres et farfadets peuplent ­l’imaginaire de l’archipel depuis la nuit des temps. Porteurs d’une éducation populaire, ces êtres transmettent des valeurs morales et ressurgissent dans les mangas ou dans les dessins animés, comme dans Le Voyage de Chihiro de Hayao Miyazaki.

C’est à leur rencontre que vous allez avec l’exposition YôkainoshimaDans ce bestiaire fantastique, vous croiserez par exemple des nahagame, l’équivalent nippon du Père Fouettard, qui descendent des montagnes à l’orée du mois de janvier  pour terrifier les enfants feignants. Armés de couteaux, ils pénètrent dans les maisons pour couper les genoux rougis des paresseux qui seraient restés trop près du poêle au lieu de participer aux tâches collectives. Les nahagame sont des êtres que l’on calme avec du saké, pratique.

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© Charles Fréger, Yôkainoshima

 

 « J’ai fait des choix qui sont d’abord esthétiques, plastiques. J’ai photographié des formes et des silhouettes d’abord parce qu’elles me plaisaient. Je ne suis ni un ethnologue ni un anthropologue. » 

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© Charles Fréger, Yôkainoshima

Charles Fréger a publié le livre « Yôkainoshima, célébration d’un bestiaire nippon » aux éditions Actes Sud, augmenté par des commentaires d’ethnologue pour en savoir plus.

Après un succès colossal aux Rencontres Photographiques d’Arles l’été dernier, l’exposition Yôkainoshima se découvre à présent à l’Espace Malraux à Chambéry, du 15 septembre (inauguration à 19h) au 28 octobre prochain.

Bonus : l’exposition Yôkainoshima est en lien avec le spectacle Tshägg de Lucie Eidenbeiz, une enquête dansée au coeur des traditions de la Suisse sauvage, à l’Espace Malraux en janvier 2017.

Retrouvez ici les coups de coeur de Radio Ellebore pour la saison 16/17. 

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