Deux âmes s’aimant d’un amour sincère ne peuvent être séparées bien longtemps. Malgré les
obstacles qu’il peut y avoir sur notre route, l’espoir est, et doit exister. C’est en tout cas ce que
croît Erna, une jeune mère déportée en Sibérie avec sa petite fille. Elle écrira pendant quinze
ans à son mari avec la conviction de croire qu’elle le retrouvera un jour, à la croisée des vents.
Ambitieuse et rarement vue à l’écran, cette beauté plastique magnifie la guerre et la répression
en un noir et blanc immaculé, éclatant comme les ténèbres, sombre comme les cieux. Le
réalisateur filme des tableaux humains sous forme de longs plans-séquences aussi harmonieux
que les combats sont intolérables. Souvent prêt à craquer, le spectateur sera fasciné par la
forme épistolaire de cette œuvre, donnant à cette dernière un élan lyrique aussi déchirant que
profond.
Filmé au ralenti, on se délecte de ces plans du passé, là où la guerre n’existait pas, là où
l’amour et la sérénité se conjuguaient avec harmonie. Les protagonistes y sont apaisés,
heureux d’exister. Il suffit alors de franchir les barrières du domicile, lieu si serein et
protecteur, pour voir le temps s’arrêter, les visages se figer et les sentiments disparaître.
Bienvenue dans un monde violent, avec son lot inépuisable d’injustices et de punitions, où
seule la douce nostalgie d’un temps révolu peut nous tenir en vie.
Martti Helde parvient à décrypter de manière admirable et sans aucune morale démago tous
ces ressentis que peut avoir un être humain face à la solitude. Par le septième art, il dresse une
splendide dénonciation d’un fait historique méconnu, et pourtant effroyable. Puisqu’enfin le
cinéaste ne choisit pas les mots mais les images pour faire passer son message, n’utilisons
alors que deux simples termes pour lui témoigner toute notre gratitude : merci, et bravo.