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The We and The I, de Michel Gondry, Avec Michael Brodie, Teresa Lynn, Lady Chen Carrasco

Chers lecteurs, la rentrée est déjà bien derrière nous, il est temps que la chronique cinéma se remette au goût du box office. Cette semaine, c’est Michel Gondry qui fait notre bonheur. Ce réalisateur à l’imaginaire débordant nous a donné depuis quelques années quelques pépites d’humour déjanté (Rembobinez s’il vous plaît, The Green Hornet) mais aussi The Eternal Sunshine of the Spotless Mind ; petit bijou romantique et farfelu. Avec The We and The I, le réalisateur surprend en explorant, à priori un nouveau genre : le film social. En effet, le film retrace pendant une heure et demie le trajet d’un bus scolaire dans le Bronx, une veille de vacances scolaires. Les gamins sont odieux et détestables, mais plus la nuit tombe, plus le bus se vide et s’enfonce dans les quartiers miteux. C’est alors que le deuxième film commence ; celui qui dévoile des êtres sensibles, méconnaissables.

Au tout début du film, le bus est bondé. Le récit semble vouloir s’attarder sur chacun des adolescents, chaque personnalité ; et vu comme le bus est plein à craquer, on pense qu’on ne s’en sortira jamais. La peur de voir un film brouillon, bruyant, qui s’enfonce dans le catalogue et les stéréotypes, faute de temps pour creuser un personnage, un possible héros. Mais Gondry est plus fort que ça. Sa caméra tournoie dans cet espace si exigu. A travers les échanges de voix (souvent d’insultes), les crasses, et les objets volants non identifiés ; on parvient à faire le tour de chaque enfant, on parvient à tous les cerner dans leur diversité, on arrive même à une amorce de récit pour chacun d’eux. Ainsi, ce début de film peut être pénible pour certains spectateurs qui n’apprécient pas la douce langue du « Mother Negar Fuck that Shit » redoublé par la bande originale très hip hop.

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Pourtant, peu à peu, le bus se vide. La conductrice du bus, ange gardien qui n’intervient qu’en cas d’extrême urgence, livre les mômes à domicile et épure le récit. Des brutes épaisses qui enchaînent crasse sur crasse, on passe aux histoires d’amour, puis aux vacances, et enfin aux grandes questions existentielles : la mort, l’amour, la sexualité. C’est toute l’adolescence que retrace Gondry dans son film. Strate après strate, il décompose la figure boutonneuse et trop maquillée: le masque superficiel qu’on tient en groupe ; l’image qu’on rêve de donner aux autres ; les complexes ; et enfin les sentiments, bien cachés tout au fond. On s’attache ainsi deux fois plus à ces personnages, ces comédiens amateurs qui semblent jouer leur propre rôle. Ils révèlent peu à peu qui ils sont, quelles angoisses les animent. C’est comme si à la fin du film, nous aussi nous relevions les yeux, et que le bus était enfin vide, les lumières rallumées, et que nous devions à notre tour rentrer chez nous ; cacher les sentiments qui sont apparus à la surface et reprendre le masque.

C. Lavigne

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